mercredi 29 novembre 2017

Près de la place de la Bastille : l’étoile du port de l’Arsenal

Les berges de Seine sont des lieux de prédilections pour les flâneurs parisiens surtout depuis leurs aménagements récents. Quelques réalisations sont remarquables dont celle des jardins flottants Niki de Saint Phalle, rive gauche.
Depuis la place de la Bastille en descendant vers l’Arsenal on accède facilement aux berges rive droite, en longeant le port où sont accostés péniches et bateaux de plaisance. 


Reste à franchir la passerelle de l’écluse pour se trouver du bon côté et s’engager dans le petit tunnel badigeonné de chaux pour retrouver les eaux plus agitées du fleuve.
En revenant sur vos pas une surprise vous attend. La voûte du passage de l’éclusier est décorée d’une étoile dorée qui semble suspendue dans l'espace. 


A l’intérieur vous levez les yeux pour voir ça de plus près… 


La forme peinte sur la paroi est bien curieuse ! En trompe-l’œil, elle se joue de votre perception !
Cette anamorphose de Georges Rousse réalisée en 2012 pour la ville de Paris, n'est visible dans sa forme pleine que depuis un point précis matérialisé au sol à l’extérieur du passage...


 
Prendre du recul... secret de la plénitude!

  

mercredi 8 novembre 2017

Arycanda, cité antique en Lycie

L’antique Lycie correspondant à l’actuelle péninsule de Teke, entre Fethiye et Antalya, villes côtières au sud ouest de la Turquie, ne manque pas d’atout : douceur du climat méditerranéen, reliefs imposants, richesses naturelles et patrimoniales exceptionnelles. La voie lycienne, circuit balisé depuis 1999 sur l’initiative de Kate Clow, une anglaise tombée sous le charme des paysages enchanteurs, suit d’assez près le littoral et passe donc à proximité d’un grand nombre de sites archéologiques (Telmessos, Sidyma, Xanthos, Letoon, Patara, Antiphellos, Teimiussa, Simena, Myra et Andriake, Olympos, Phaselis…)



  
Mais tout comme Kadyanda, près de Fethiye, visité en juin dernier, Arycanda se situe plus à l’intérieur des terres et reste donc peu fréquenté. Ce site se trouve à 30km au nord de Finike, en direction d’Elmalı, sur les hauteurs du village actuel d’Arif.
Les deux cités antiques, outre qu’elles ne soient pas situées sur le littoral ont d’autres points communs.
Tout d’abord leur toponymie avec le suffixe –anda– semble attester une fondation lycienne qui a précédé de plusieurs siècles l’hellénisation. Arycanda se nommait alors Ary-ka-wanda, signifiant en lycien « le lieu près du haut rocher ».
Une position stratégique en hauteur, près de 1000m, assurait la protection de la population.
A flanc de montagne, les constructions s’étageaient en terrasses sur les pentes abruptes, s’intégrant harmonieusement dans un cadre naturel d’exception.
Les vestiges ne permettent pas de faire remonter l’histoire de la cité plus loin que le 5e siècle av. JC.
Elle fut également identifiée par l’archéologue britannique Charles Fellows en 1838 grâce aux inscriptions gravées sur les pierres tombales et aux pièces de monnaies retrouvées sur les lieux.
La cité a été fouillée pendant plus de 40 ans sous la direction du Prof. Dr. Cevdet Bayburtluoğlu, décédé en juin 2013. Il semblerait que les fouilles aient été interrompues depuis sa disparition. Les panneaux explicatifs sont un peu défraîchis… Il n’est pas facile d’identifier certains vestiges.




Comme les autres cités de Lycie, l’histoire d’Arycanda est jalonnée des dominations successives des Perses dès le 6e siècle av. JC, de la conquête d’Alexandre au 4e siècle av. JC, puis de la domination de ses successeurs, les Séleucides, sur la région. Un temps sous le contrôle de Rhodes, l’arrivée des Romains au 2e siècle av. JC ne fit pas de la Lycie, une province romaine d’Asie, mais elle le devint en 43 sous l’empereur Claude. Avant cette date Arycanda était membre de la Confédération Lycienne. Sa prospérité fut à son apogée du 2e siècle av.JC jusqu’au 3e siècle qui vit son déclin. Les séismes et les invasions arabes la ruinèrent mais elle survécut dans la période byzantine jusqu’au 11e siècle avant d’être définitivement abandonnée.
La plupart des vestiges de monuments publics et d’habitations sont datés de l’époque romaine.
Les pans de murs des thermes s’élèvent encore sur deux niveaux, près du gymnase.





La construction du traineum, au début du 2e siècle, fut certainement commandé par l’empereur romain Hadrien en l’honneur de Trajan, son prédécesseur. (Comme celui de Pergame).
De celui-ci on peut voir des pans de murs percés de niches adossés à la montagne, qui entouraient un temple surélevé au centre, dont il ne reste pas grand chose.


Des pavements de mosaïques ornaient les villas des notables.










D’autres vestiges sont plus anciens, en particulier le temple du dieu solaire Helios, daté du 4e siècle av.JC.


Les tombeaux monumentaux de l’une des nécropoles:






A mon grand regret cette visite d’Arycanda, sous un ciel menaçant est restée lacunaire… Nous avons renoncé à défier les éléments sur ces pentes escarpées !



Le stade, le théâtre, l’odéon, le bouleutérion et autres vestiges, nous les verrons une autre fois peut être…

dimanche 5 novembre 2017

Tortue, moulin et poivre rose de Bodrum

De retour d’une promenade automnale dans la péninsule de Bodrum, une petite sélection de photos pour partager un moment de sérénité…


Elle se promène et nous aussi…


Tournons autour du moulin pour trouver son bon profil sur fond de ciel azur…



Il faudra une autre sorte de moulin pour écraser la récolte des baies roses du faux poivrier et en parfumer délicatement quelques mets…




mercredi 1 novembre 2017

Saint Nicolas de Myra

En octobre dernier Saint Nicolas, né à Patara, sur la côte sud ouest de la Turquie, a déclenché les polémiques ! Ses reliques n’auraient jamais quitté sa terre natale, l’antique Lycie. Son tombeau intact serait toujours enfoui dans le sous sol de la basilique de Myra (actuelle Demre) édifiée en 520 sur les ruines calcinées de celle où il fut évêque au 4e siècle, et fut enterré après sa mort présumée le 6 décembre 343.


On s’empresse de soupçonner les Turcs de camoufler derrière cette révélation, encore hypothétique, le moyen de palier au refus des autorités italiennes de restituer les reliques du saint qui auraient été subtilisées par des marins en 1087, conservées depuis dans une église à Bari et générant toujours des miracles, parait-il. Une phalange aurait même été dérobée au 15e siècle pour devenir objet de dévotions dans la basilique Saint-Nicolas de Port en Lorraine. La vénération du saint se serait propagée pour se transformer au fil des siècles en culte du Père Noël…
Cependant ces reliques éparpillées ne proviennent peut être pas de la dépouille de l’évêque mais d’un autre ecclésiastique. Le tombeau vide ne serait pas celui de Saint Nicolas. Les marins auraient-ils involontairement profané une autre sépulture ?
Les restaurations et travaux de conservation ont révélé dans une cavité sous l'édifice, la présence d’un tombeau inconnu jusqu’ici. 


Il est sans doute prématuré d’avancer ou d’écarter la moindre hypothèse… Le directeur des fouilles en cours aurait certes pu tempérer son enthousiasme à propos de cette découverte.
Les médias en profitent pour relayer les propos d’une responsable du centre de Saint Nicolas à Bari, insinuant que la prétention des Turcs à rétablir une vérité historique ne serait pas dénuée de visées moins honorables, plus mercantiles ! Mais n’est-ce pas partout dans le monde l’activité principale, hypocritement inavouée en particulier sur les lieux de pèlerinage? Que craignent les autorités de Bari et la communauté chrétienne ? De subir des moqueries pour avoir naïvement vénéré pendant des siècles les ossements d’un inconnu ou de perdre une lucrative source de prestige ?
De toute façon l’intérêt pour la basilique de Demre n’a pas attendu les reliques du saint homme, qu’elles s’y trouvent encore ou pas. Les pèlerinages n’ont jamais cessé et le tombeau vide resta au fil des siècles un lieu de recueillement.
Celui-ci ou un autre…


Les visiteurs sont nombreux à déambuler dans les vestiges de la remarquable basilique pour tenter d’identifier les époques des éléments architecturaux, de voir les fresques illustrant la vie des apôtres et les pavements de mosaïques de marbre et albâtre en partie conservés.









Il n’est pas impossible qu’ils soient plus nombreux désormais à faire le déplacement pour les célébrations du 6 décembre, se déroulant chaque année. En particulier les chrétiens orthodoxes de Grèce et de Russie.

Les Turcs ne sont pas non plus responsables de l’effet pervers des nombreuses légendes que le bon et généreux évêque de Myra inspira en Occident et qui ont fini par le transformer en personnage bedonnant à barbe blanche et costume rouge bordé de fourrure, circulant en traîneau pour distribuer des cadeaux.
La tentation est grande de récupérer le mythe du Père Noël au look pas très éloigné d’un autre personnage plus oriental mais tout aussi légendaire : Nasrettin Hodja


lundi 24 juillet 2017

“Chateau Nuzun”, une exploitation viticole en Thrace

Récemment s’est présentée l’occasion de visiter une propriété viticole, tout près du village où nous passons l’été. Elle est située sur les hauteurs de Yeniçiftlik, village de Thrace en bordure de la Marmara. Je ne connaissais pas son existence !

On y accède en prenant sur la droite un chemin tout juste stabilisé (sur environ 3 km) après le panneau indiquant la fin du village de Yeniçiftlik en direction de Tekirdağ.


A vrai dire son implantation est récente, même si la région est un terroir viticole depuis l’antiquité et que de nombreux vignerons y soient installés depuis plusieurs décennies. Passée la ville de Tekirdağ, j’avais visité les exploitations « Umurbey » et « Barbare wine ». Et il y en a bien d’autres … (Melen, Kutman, Suvla etc…) et même une route des vins!


Nazan et Necdet Uzun, propriétaires du domaine « Château Nuzun », se sont lancés dans cette grande aventure après de longues années passées en Californie, murissant lentement mais avec détermination le projet de repartir en Turquie pour produire un vin de qualité, afin de répondre à la demande d’une clientèle turque qui connait les bons vins du monde, et de séduire si possible une clientèle internationale. Plantation des pieds de vignes en 2005, construction du bâtiment avec cave en sous-sol et première vendange en 2008, premières ventes en 2010.


La passion pour leur nouveau métier est toujours là et l’ambition de réussir aussi, mais un soupçon de désillusion a voilé l’enthousiasme des premiers pas. Ils n'ont pas vraiment choisi le bon moment pour se lancer dans cette activité! Depuis juin 2014, les taxes se multiplient, les dégustations gratuites sont interdites, ainsi que la promotion de produits alcoolisés sous toutes ses formes. Pas question non plus de faciliter l’accès des propriétés par des panneaux en bordure des grands axes routiers. La plus grande discrétion est de mise. Pas de quoi favoriser le tourisme viticole en Thrace comme dans tout le pays! La plupart des routes des vins qui commençaient à se dessiner ont du être rebaptisées promptement routes du raisin pour ne pas se faire épingler par la législation.

Mais on peut toujours compter sur l’efficacité du bouche à oreille… Il reste des amateurs !

Nous voici donc devant la propriété, avec vue plongeante sur les vignobles et la mer.



Si son nom "Chateau Nuzun" peut vous paraître pompeux, il ne doit rien à un trait de caractère prétentieux de ces producteurs mais à leur volonté de faire reconnaître leur savoir-faire en toute modestie. En effet leur exigence se porte sur les raisins exclusivement récoltés sur les parcelles de la propriété et sur les techniques de vinification mises en œuvre sur place. Pour rappel, la mention "château" est devenue courante dans le Bordelais à partir du 19e siècle pour identifier l’ensemble des moyens de production au même titre que les « clos » et les « domaines » et comme les Turcs ont une préférence marquée pour les vins de Bordeaux, il était naturel qu’ils empruntent cette symbolique appellation.

La visite était assurée ce jour là par Nazan, épouse de Necdet Uzun.
On commence par le laboratoire avec un pressoir moderne qu’on peine à identifier, des cuves en acier inoxydable où se fait la fermentation et des appareils de mesure complexes pour sélectionner les différents cépages qui seront utilisés seul ou en assemblage selon leur qualité gustative et selon les années afin d’obtenir un vin équilibré. La capacité annuelle est estimée à 100 000 bouteilles, mais jusqu'à maintenant la production a varié selon les récoltes entre 5 000 et 35 000.


On descend ensuite dans la cave. L’affinage en fut de chêne (français) pendant 14 mois ou plus est la dernière étape avant la mise en bouteilles.


Pour la dégustation nous remontons dans le salon.


Une sélection de 4 vins sera proposée à nos papilles, accompagnée de quelques cubes de fromages et un assortiment de fruits secs, pour 10TL (2,50€)

Un rosé 2013
Un Chateau Nuzun 2008, Cabernet Sauvignon-Syrah.
Un Chateau Nuzun 2010, Cabernet Sauvignon. 
Un Chateau Nuzun 2011 Cabernet Sauvignon, Merlot, Syrah, Pinot noir

J’en ai personnellement retenu deux mais je me garderai bien d’en faire de longs commentaires. 


Je les ai trouvé fruités, le second un peu plus charpenté. Bien qu’ayant déjà participé à quelques dégustations (dont une à Istanbul) on ne s’improvise pas œnologue !
J’ai d’ailleurs été la première étonnée de mon choix puisqu’il s’est porté sur un bi-cépage Cabernet Sauvignon-Syrah et un mono cépage Cabernet Sauvignon, que généralement je n’apprécie pas particulièrement. J’attendais plus du dernier qui contient du Pinot noir, cépage de Bourgogne, mais son assemblage de la cuvée 2011 ne m’a pas convaincue. Beaucoup trop lourd en tanin à mon goût, mais il a été plébiscité par d’autres dégustateurs. Le coupage sans doute faible en Pinot et les caractéristiques du terroir y sont probablement pour quelque chose.
On remarque aussi la quasi exclusivité de cépages originaires de France sauf dans un assemblage Château Nuz 2011 contenant un cépage autochtone Öküzgözu qui habituellement satisfait mon palais. Il faudra donc revenir et demander à le goûter…
Pour cette honnête production on pourra émettre quelque réserve sur les prix, entre 10 et 20 € la bouteille selon les années et les assemblages (avec la réduction à partir de six bouteilles, même différentes),  mais n’oublions pas qu’ils sont bien gonflés par les taxes. Les quelques vins français importés, de qualité comparable, sont ici bien plus chers qu’en France. On peut donc y trouver une alternative intéressante.


Difficile à trouver dans le commerce, mais pas impossible (voir ici). Quelques restaurants d’Istanbul en proposent certains crus dans leur carte.

Visite et dégustation sont prévues le samedi et le dimanche de 14 à 16h et sur rendez-vous pour d’autres jours et d’autres horaires.
Çeşmeli Köyü, Marmara Ereğlisi
Tekirdağ, Türkiye, 59740

Et puis, en Thrace, il y a aussi quelques producteurs amateurs !
De tout petits vignobles est issu le breuvage contenu dans cette bouteille (non commercialisée). 


J’ai bien aimé sa couleur et son arôme de fruits rouges. J’aime bien aussi son nom puisqu’il fait référence à la cité gréco romaine de Perinthos dont j’ai évoqué les vestiges dans ce blog ici et ….